jeudi 1 septembre 2011

http://www.youtube.com/watch?v=drJD-92G8hU

La silhouette fantomatique surgit du néant.Elle arpente les murs,touche du bout de ces doigts à peine humains,mon corps muet.La chambre est glaciale,malgré que le chauffage est sensé garantir une chaleur assez intense.
Son apparition,je m'y attendais.Depuis le temps,j'ai fini par ne plus être surprise,je me suis même surprise à l'attendre.
Sa forme ondulée est dépourvue de yeux,et cela ne m'a jamais effrayée.En fait,rien ne m'effraie en ma visiteuse hybride.
Elle commence à me toucher,lassante,et moi lassée,je lui dis:"on va encore jouer au même jeu ce soir?".Elle se garde de me répondre.Les ténèbres vont de paires avec les fantasmagories fantomatiques et ce n'est pas de simples mythes reçues.
Et dans le noir somptueux,le blanc de sa peau est d'une beauté fatale et tragique.Elle continue à effleurer ma peau,ses caresses me font douter de l'hyperthermie de l'enfer.J'ai froid,je sanglote,je grelotte mais je ne l'arrête pas.Mon ton lassé de tout à l'heure n'était qu'un jeu théâtrale.Si elle n'a pas répondu,c'est qu'elle sait que depuis des années,je me complais à jouer avec elle,malgré l'ennui,malgré le risque,malgré le danger imminent de gésir inerte si elle oublie de s’arrêter.
A un moment,de sa main,elle me presse le bras,et c'est comme si,noyée dans une mer de l’antarctique,mon inertie n'était plus qu'une affaire de secondes.Sa voix rauque,qui avait ébranlé ma raison la première fois où elle m'avait parlé,vint repêcher cette fois,mon corps presque atone.
Elle me relâcha et me dit:"Il est mort"
A peine avait-elle prononcé ces mots meurtriers,la visiteuse s'était évaporée.

Je ne sais plus ce qui s'était passé après.Le matin,au réveil,tous mes livres étaient déchirés,ma commode était renversée,les murs étaient tachés de peinture rouge,qui vue de plus près,se révélait n'être que du sang,l'armoire était vidée,mes vêtements jonchaient le sol,ma couette était déchiquetée,comme après le passage,d'un chien enragé,à qui on aurait pas donné assez de viande.Et il était évident que dans cette chambre,quelque chose avait été avalé.
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Mon médecin m'avait déclarée malade,il y a quelques années.
Mes parents m'y avaient emmené de force,pensant bien faire.Mon corps subissait une hypothermie inquiétante qu'aucune médecine ne semblait pouvoir expliquer.Et dans ces cas là,il était évident que les séances de divan étaient la seule solution.Sinon autant avouer que la science n'est qu'un amas de sornettes.
Cependant,j'avais très mal pris le diagnostic.Je ne suis pas retournée le voir.
En ce temps là,je rageais contre les rites machiavéliques de la psychanalyse.Pourquoi me taxer d'un mal rien que parce que je n'agis pas comme la masse?
Je m'étais gardée,cependant,de prendre trop de risques.J'évitais les gens,j'évitais les enfants,j'évitais les animaux.J'avais peur de moi pour toute vie qui m'était extérieure.
Seule la mienne ne subissait aucune sur-protection.Sans doute,je savais qu'au fond,les envies suicidaires n'étaient pas mon fort.
D'années en années,une misanthropie s'était installée dans la morgue de toutes les pensées et les idées que je me refusais,mon inconscient.Mais elle se ranimait comme un lapsus à chaque contact humain.
Et l'humain,au fil du temps,devint rareté dans ma vie.
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Mon beau-père m'avait élevé sans ma mère.Et je l'avais hait de m'avoir privée du luxe de l'orphelinat.Longtemps,très longtemps.
Mon beau-père avait 50 ans quand je me mis à avoir les traits de ma mère.Ou plus explicitement,à être un clone de ma défunte mère.J'avais un teint laiteux froid glacial,qui contrastait avec ma chevelure orange flamboyante,et à mesure que je grandissais,ses exclamations "Dieu que tu lui ressembles" ne faisaient que se dupliquer.
Nous vivions en reclus,dans une maison,qui s'est vue pourvue d'un ramassis de légendes occultes par  les gamins railleurs du quartier.Et le visage hirsute du beau papa n'arrangeait pas la donne.
Ma chambre donnait sur la sienne,et mon corps semblait le passionner plus que la télévision.A 15 ans,on ne pouvait pas comprendre.Je me suis donc contentée de le haire encore plus.Et plus je le haïssais,je voyais ma chambre se remplir d'offrandes.
Sa culpabilité de m'avoir dépucelée dans une sorte d'inceste glauque l'obligeait à m'offrir des choses en compensation de ce qui m'avait été ôtée.
Bien plus qu'une virginité,bien plus que l'innocence,bien plus qu'une sexualité saine,le beau père m'avait ôtée le droit de chérir tranquillement le souvenir de ma défunte.
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Ce matin là,je venais d'avoir 18 ans,le bol de céréales empestait la journée hivernale.Je me languissais de penser que cette année,mon anniversaire ne serait pas aussi froid.
Et pour cela,j'allais m'offrir un très beau cadeau.J'allais m'offrir une vie,une paix,de la chaleur.J'allais enterrer son cadavre aux cotés de son épouse.


L'ordre est dérisoire.

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